Lynx ibérique Bordalo II (Arthur Bordalo)

Voilà donc ce Lynx ibérique, jadis roi discret des forêts de la péninsule, réduit à l’état de totem urbain, assemblage hétéroclite de nos rejets quotidiens…

Lynx ibérique Bordalo II (Arthur Bordalo)

📍Parque das Nações – Lisbonne | Portugal

En Septembre, j’étais de passage à Lisbonne et alors que je déambulais dans entre les ruelles pavées et les façades aux azulejos colorés, mon regard fut attiré par une créature monumentale de 20 mètres trônant fièrement au milieu des édifices modernes.

Voilà donc ce Lynx ibérique, jadis roi discret des forêts de la péninsule, réduit à l’état de totem urbain, assemblage hétéroclite de nos rejets quotidiens. Ironie mordante : l’animal menacé d’extinction renaît, colossal, de nos déchets proliférants.

Lisbonne l’expose fièrement, comme pour exorciser notre culpabilité. La ville moderne, dans sa frénésie consumériste, engendre ces montagnes de rebuts qu’elle tente de sublimer en œuvre d’art.
Mais n’est-ce pas là qu’un pansement dérisoire sur la plaie béante de notre rapport au monde ?

Ce lynx de pacotille trône au milieu des tours de verre et d’acier, nouveaux temples de notre civilisation. Il nous fixe de son regard fait de plastique et de métal rouillé, accusateur muet de notre hubris. Nous voilà donc réduits à créer des simulacres de nature avec les vestiges de notre société du jetable.

Pourtant, il y a dans ce geste artistique une forme de rédemption, un espoir ténu. L’homme, conscient de ses errements, tente de transmuter le vil en noble, le déchet en beauté. Est-ce suffisant ? Certainement pas. Mais c’est un début de prise de conscience.

Ce lynx de bric et de broc nous rappelle ce que nous avons perdu, ce que nous sommes en train de perdre. Il hurle silencieusement au cœur de la cité : ‘Regardez ce que vous avez fait de moi, de mon habitat, de votre planète !’

Reste à savoir si nous saurons entendre ce cri d’alarme, si nous aurons le courage de changer vraiment, ou si nous nous contenterons de recycler notre mauvaise conscience en œuvres d’art spectaculaires, alibis esthétiques de notre course à l’abîme ?

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